Les méthodes d'exécution et le déroulement des travaux


I- Appuis et fondation :


Les puits marocains


     Les puits marocains permettent le support des piliers. Les principes retenus sont en fonction des terrains rencontrés. Sur le site du viaduc, en terrain meuble, les parties de puits excavés sont blindées par un "blindage lourd". En terrain rocheux, les parties de puits excavées par minage sont blindées par un "blindage léger". Chaque puit marocain a été excavé avec des pelles hydrauliques équipées de brise-roches par passes successives de 1.50 m avec confortement successif en béton projeté. Chaque puit est équipé en tête d'une margelle périphérique en béton armé. Sur une même semelle, les puits sont réalisés deux par deux, par paire située en diagonale.


Semelles


     Les semelles, dont l'épaisseur varie entre 3 m et 5 m sont réalisées de façon traditionnelle à l'aide d'un coffrage sur toute la hauteur qui est maintenu en pied à l'aide de tiges d'ancrages. Les semelles représentent des bétonnages variant de 900 à 2100 m3.


Fûts des piles


     Les levées de chaque partie des piles, fût unique inférieur et fûts dédoublés en partie supérieure, sont réalisées par hauteur de 4 m. Les coffrages sont du type auto-grimpant pour la partie extérieure et du type semi-grimpant pour l'intérieur. Les trentes premiers mètres des piles sont bétonnés à la pompe. Au-delà, le bétonnage est réalisé à la benne (3 m3) à l'aide d'une grue à tour de 65 m de flèche et d'une capacité de 20 t maximum.


     Sur chaque pile, le chantier tourne à deux postes de sept heures. Six outils coffrants sont installés sur le chantier et le cycle de rotation de chaque levée de bétonnage est de 3 jours pour les fûts uniques et de 3 à 4 jours pour les fûts dédoublés en partie haute. Les piles sont réalisées en béton "haute performance" B60 (cliquez ici pour en savoir plus). Le béton est réalisé sur place dans la cimenterie d'Eiffage située juste à côté du chantier.

Hauteur totale des piles :
P1: 94,50 m
P2: 244,96 m
P3: 221,05 m
P4: 144,21 m
P5: 136,42 m
P6: 111,94 m
P7: 77,56 m

II- Tablier :

     Le tablier métallique de l'ouvrage est réalisé par phases successives d'assemblage et de lançage à partir des plate-formes aménagées derrière les culées C0 et C8. Sa longueur définitive sera de 2460 m.

     Depuis la plate-forme côté C8, on réalise une partie d'ouvrage de 1730 m de longueur de C8 à mi-travée P2-P3. Une autre partie d'ouvrage de 717 m de longueur est réalisée depuis la plate-forme C0.
Le caisson central du tablier est réalisé par éléments de 15 à 22 m de longueur d'un poids maximal de 90 t. Les parties du tablier sont à section trapézoïdale. Les panneaux qui constituent les caissons centraux sont fabriqués dans l'usine Eiffel à Lauterbourg puis transportés à Fos-sur-Mer où ils sont assemblés et enfin acheminés sur le chantier par convois exceptionnels au rythme de deux caissons par semaine.


Les caissons centraux sont assemblés, réglés puis soudés entre eux sur le chantier à partir de gabarits spécifiques. Les soudures sont toutes contôlées à 100% par ultrasons et magnétoscopie.
Les parties latérales permettant de réaliser la largeur totale du tablier sont assemblées aux caissons centraux à partir de gabarits spécifiques et d'étaiements internes provisoires.
Chaque partie latérale est constituée de quatre panneaux et d'un caisson de rive. Les panneaux dont la largeur est variable de 20 à 24 m sont livrés sur le chantier eux aussi par convois exceptionnels. Le poids unitaire de chacun des panneaux est inférieur à 40 t.
Les opérations de lançage se terminent par le clavage des extrémités de porte-à-faux au milieu de la travée P2-P3. Toutes les grandes travées, exceptée la travée P2-P3 au dessus du Tarn, comportent un appui provisoire à mi-travée. Pour les travées de rive, les appuis provisoires sont implantés à 36 m de chaque culée c'est-à-dire à 168 m des piles P1 et P7 respectivement.
Les appuis provisoires intermédiaires sont constitués de palées métalliques en treillis avec membranes et diagonales en tubes. Les palées ont une section carrée de 12x12 m. Ils sont télescopés et aident à supporter le tablier entre deux piles. Ils seront enlevés lorsque le jonction sera faite au dessus du Tarn.
Le tablier sera aussi équipé d'écrans brises-vents qui prendront une forme arrondie. Ces écrans sont en plexiglace translucide, c'est-à-dire qu'on pourra distinguer le jour mais on ne verra pas le paysage (mesures de sécurité). Mis à par la sécurité, le principal but de ces écrans est de diviser par 2 le vent qui souffle. Le tablier est principalement constitué d'acier très souple pour permettre une grande flexibilité. Il est recouvert d'un revêtement isolant pour lutter contre la rouille et le gel. Précisons aussi que le tablier est "creux" pour permettre aux équipes d'entretien de circuler à l'intérieur afin de réaliser les réparations.

     Les pylônes P2 et P3, qui servent de pylônes provisoires de haubanage pour la mise en place du tablier, sont érigés  au-dessus du tablier. Pré-assemblés au sol, les pylônes sont ensuite posés sur le tablier à l'aide d'une grue sur chenilles. La partie supérieure de chaque pylône ("le chapeau") est installée après sa mise en place, la mise sur appuis et la réalisation du haubanage. A la fin du lançage, les pylônes P1 et P4 à P7 sont entièrement assemblés et soudés sur les plates-formes situées derrière la cullée C0 pour le pylône P1 et derrière la C8 pour les pylônes P4 à P7. Les pylônes ont une hauteur de 90 m.

     Les têtes des palées provisoires et les têtes de piles sont équipées d'un chevêtre recevant les appuis de lancement appelés balancelles et plates-formes de travail.

     Sur chaque tête de piles ou palées, chaque balancelle est munie d'un translateur, système à 2 vérins hydrauliques horizontaux de 60 t assurant soit l'effort moteur, soit l'effort de freinage pour le déplacement du tablier. Sur l'ensemble du chantier, on dénombre 64 translateurs en tout. Les translateurs sont des appareils de levée, synchronisés par ordinateur (GPS) et poussent le tronçon de tablier dans le vide par palier de 60 cm à la vitesse de 10 m/h. Chaque translateur est constitué d'un berceau en "U" dans lequel se déplacent une cale biaise de levage actionnée par un vérin horizontal de 250 t et une coulisse actionnée par les deux vérins de lançage de 60 t et glissant sur une surface horizontale.

   Précisons aussi que les palées provisoires sont plus grandes que les piliers, afin d'éviter qu'une force horizontale ne s'exerce sur les piliers lors de la poussée du tablier. De plus,  le tablier n'est pas fixé sur les piliers, il est tout simplement posé !

(cliquez sur l'image pour l'agrandir)

     Il n'y a que 4% du travail qui est réalisé en hauteur, tout les reste ce fait sur la terre ferme.

 

Le Viaduc de Millau - TPE 03/04